Chili

San Pedro de Atacama

Le poste pour quitter la Bolivie est à moins d'un kilomètre. Nous nous faisons tamponner, comme il se doit et remontons dans le bus pour passer devant un panneau indiquant "Republica de Chile".

Après quelques kilomètres de piste en plein désert, nous arrivons sur une route asphaltée dont chaque côté comporte des lignes jaunes et un bas-côté stabilisé et dont le centre est partagé par une ligne blanche. Je ne ments pas en disant qu'un applaudissement général se fait entendre dans le bus. Raz le bol des pistes ? Retour à la "civilisation" ? Toujours est-il que le soulagement est unanime !

Le bus nous fait rapidement passer de 4500 mètres aux 2500 mètres de San Pedro de Atacama. Cette ville, par laquelle nous entrons au Chili, est perdue en plein désert du même nom, l'un des plus arides du monde. Nous descendons du bus et nous devons passer nos chaussures sur un tapis recouvert de produit désinfectant. L'entrée au Chili de fruits ou de sous-produits animaux est interdite et nos sacs à dos sont inspectés sommairement. Une fois nos passeports tamponnés, le bus nous conduit au centre ville (!).

Bolivie chili chili

Notre hôtel ayant été repéré, nous pouvons prendre une douche rapidement. Le paiement de la chambre peut se faire soit en pesos chiliens soit en dollars et dans ce cas, les étrangers sont exemptés de taxes. Soit un gain de plus de 15%. C'est toujours ça de pris, sachant que la vie au Chili est l'une des plus chère de tout le continent sud-américain. L'hôtel étant excentré nous dirigeons ensuite vers la ville pour y déjeuner.

Tout y est propre, même si les maisons sont en adobe. Les rues, non asphaltées, sont nickels, aucun papier ne traînant par terre. L'accueil est souriant. Retour à la civilisation confirmé !

Seul problème, l'espagnol du Chili est très différent de celui de Bolivie ou du Pérou : les "s" ne sont pratiquement pas prononcés et l'intonation est mise sur la fin des phrases. On ne sait donc plus si l'on à affaire à une affirmation ou une interrogation. Beaucoup de mots ou d'expressions sont différents…

La ville et très calme et sa Plaza de armas est digne d'un film. L'église San Pedro d'une blancheur éclatante est construite en adobe. Autour, des arcades sous lesquelles se trouvent deux ou trois bistrots, de la musique (on est encore en Amérique latine !), une fontaine au centre et quelques palmiers pour faire de l'ombre aux chiens qui font leurs siestes un peu partout. Ils ne se poussent pas quand quelqu'un passe, signe qu'ils ne sont pas maltraités comme au Pérou ou en Bolivie. Bref, le calme et le repos !

Les gens se disent bonjour (et à nous aussi) et les voitures s'arrêtent pour laisser passer les piétons. Pas de klaxons inutiles, pas d'agressivité au volant. Ces changements nous sont autant d'air frais !

La ville est très jeune. Même si les rues ne sont pas asphaltées, les restaurants ou autres boutiques ont un style proche de celui que l'on trouve à Barcelone. L'inventivité est partout présente et fait immanquablement penser à la movida espagnole.

Aux mêmes causes, les mêmes effets : après la dictature, la liberté est créatrice. Dans la plupart des restaurants, un patio, largement ouvert sur le ciel, permet le soir de faire de gigantesques feux de bois autour desquels il est bon de dîner. Il ne pleut pratiquement jamais dans ce désert, mais la nuit, il y fait assez froid.

De plus, le peso chilien valant en gros un (ancien) de nos centimes, nous avons le plaisir de voir tous les prix indiqués en anciens francs ! Pour des vieux comme nous, c'est vraiment rassurant !

La vallée de la lune

Nous ne restons pas inactifs et visitons la toute proche vallée de la lune aux reliefs impressionnants et…lunaires, d'ou le nom habilement trouvé ! De la lave érodée par le vent, du sable et deux couleurs dominantes, le brun et rouge donnent un aspect particulier à ce lieu. Une dune de sable énorme s'élève au cœur d'un volcan.

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En anciens du Machu Picchu, nous la gravissons sans trop de mal et pouvons contempler un paysage d'enfer : nous dominons la caldera d'un immense volcan éteint. Nous y attendons la chute du jour et admirons un coucher de soleil qui amplifie en l'étendant, ce curieux relief.

Les mines de Chuquicamata

Le 2 septembre, nous prenons le car pour Calama, ville peu intéressante mais située à côte des mines de cuivre de Chuquicamata. Mines à ciel ouvert impressionnantes dont la profondeur dépasse 1000 mètres et la largeur 4 kilomètres ! D'énormes camions descendent à vide la route en spirale pour la remonter quelques temps après chargés de plusieurs tonnes de minerai. La roue d'un camion mesure plus de 3 mètres de diamètre. Ballet hallucinant !

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On est bien loin du marteau de la mine de Potosi. Ancienne propriété des américains, cette mine a été l'un des éléments qui a causé la chute d'Allende. Les américains n'ayant pas supporté de perdre cette richesse lorsque que le président du Chili l'a nationalisée. Aujourd'hui, le Chili, premier producteur de cuivre au monde en produit plus de 40% à lui tout seul.

Curieusement, Pinochet n'a pas jugé utile de dénationaliser cette mine !

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Même si la visite est un peu décevante, le site est fantastique. Les différentes couleurs de la terre ouverte se conjuguent en camaïeux le long de la rampe en escargot sur laquelle se déplacent les camions qui semblent si minuscules vus du haut. De la poussière et du bruit et le sentiment d'une organisation impeccable pour un rendement maximum. Nous reprenons le car dans la soirée pour 14 heures de route en direction de la Serena, toujours plus au sud.

La Serena

Cette ville, plus importante que les deux précédentes, est située en bord de mer. Nous y restons plusieurs jours, non pas pour la visiter, mais pour profiter du Pacifique et souffler un peu.

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Nous faisons la connaissance de deux phoques échoués sur la plage mais peu diserts car très morts. Le spectacle qui étonne les deux parisiens, ne fait pas plus d'effet aux chiliens que nous croisons. Pas plus qu'une méduse pour nous…

De nombreux restaurants bordent la plage et offrent des fruits de mer et autres poissons de grande qualité. Nous y savourons les premiers vins de 2004. Alors que les vendanges ne sont pas encore commencées en France, elles ont eu lieu ici au mois de mars ! Le vin chilien, composé de cépages d'origine française est excellent et nous nous faisons un devoir de le découvrir, avec modération…

Mais notre repos ne dure pas trop, nous sommes virés de l'hôtel par un groupe qui a retenu toutes les chambres. Pas de problème, nous prenons la clé des champs et un bus pour la vallée de l'Elqui, siège des vignes d'où est produit le fameux Pisco.

Outre le fait de reprendre notre souffle, nous devons nous arrêter de descendre pour laisser arriver le printemps. Les soirées au bord de la mer étant plutôt froides, nous devons encore gagner quelques degrés avant de continuer notre voyage. L'équation est simple : plus nous descendons vers le sud, plus il fera froid et plus nous avançons vers le printemps, plus il fera chaud, Nous comptons sur le fait que l'un va compenser l'autre !

Pisco Elqui

Nous trouvons refuge et une "cabana" à Pisco Elqui, honorable cité de 500 habitants, au fond de la vallée du même nom. Village entouré de hautes montagnes et tranquille comme ça n'est pas permis ! L'église en bois est de toute beauté et c'est à peu près tout ce qu'il y a à voir.

Nous y passons plusieurs jours entourés par les senteurs des fleurs d'oranger et celles des fleurs de jasmin. Notre grande occupation, mis à part la lecture ou les parties de scrabble est d'observer l'envol paniqué des pigeons lorsqu'ils sont attaqués par deux faucons. On s'amuse comme on peut.

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L'autre grand évènement, le 13 septembre est l'arrivée à Santiago, au palais de la moneda, des deux joueurs de tennis chiliens médaillés olympiques à Athènes.

Pendant plus de quatre heures, les trois chaînes que nous recevons, retransmettent l'arrivée du bus Adidas à travers la foule en délire. Comme il n'y a pas grand chose à dire pendant tout ce temps, nous faisons connaissance avec leurs pololas (petites amies) : Carolina, la blonde de Nicolas Massu (or en double, or en simple) et Macarena, la brune de Fernando Gonzales (or en double et bronze en simple).

C'est assez ridicule, mais également fascinant. En faisant mieux attention aux pubs dans la rue, on reconnaîtra ensuite les deux joueurs sous un slogan qui explique que le Chili exporte du cuivre et importe de l'or et du bronze !

Vicuña et Ovale

Nous quittons notre havre de paix pour Vicuña afin d'aller observer les étoiles à l'observatoire de la Mamalluca, le seul qui au Chili et il y en a beaucoup, accepte les touristes la nuit. Visite intéressante et tout à la fois frustrante de ne pas rester plus longtemps. Nous observons des nébuleuses et tout un tas d'étoiles. Même à l'œil nu, le ciel est de toute manière splendide au Chili.

Ensuite, descente sur Ovalle où nous louons un pick-up afin de découvrir la région.

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Au cours des trois jours qui suivent, nous nous amusons comme des fous dans notre petite (et vieille) voiture rouge. Line est debout à l'arrière et tape sur le capot quand je dois stopper pour qu'elle fasse une photo. Un deuxième coup sur le toit pour me faire repartir. Les pistes que nous prenons sont chaotiques et poussiéreuses et elle n'est pas déçue du voyage !

Nous découvrons, entre autres, la cathédrale d'Andacollo toute en bois et chargée de recevoir les 150 000 pèlerins qui viennent dans cette ville en décembre. L'édifice est splendide !

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Dans la ville, nous tombons sur une manifestation classique en Amérique du sud, à savoir le défilé au son de la fanfare des écoliers du coin, tous en costume et marchant au pas de l'oie.

Nous assistons également à la danse nationale chilienne, la Cueca:

Danse folklorique rythmée par trois musiciens à la guitare le plus souvent et par des chanteuses. Les deux danseurs (une femme et un homme) ne se quittent pas du regard mais ne se touchent jamais. Ils tournent l'un autour de l'autre en tenant dans leurs mains un foulard blanc. Les pas sont simples, mais tout se passe dans le regard. Danse très sensuelle, révélatrice des mœurs d'un pays très catholique…

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Le 18 septembre, jour de la fête nationale, où les drapeaux chiliens fleurissent partout, la population se fait un honneur de danser la Cueca et de manger des empanadas (viande cuite à l'étouffé dans de la pâte à pain repliée en chausson) et la Parillada (barbecue..). Nous sommes ce jour là dans un parc magnifique dont l'intérêt premier est la découverte de pétroglyphes sur des rochers. Nous sommes les seuls à nous y intéresser, les autres personnes sont autour des feux de bois avec une musique à fond la caisse. Tout cela est très sympathique néanmoins.

Le parc Fray Jorge et les attrapes brumes

Nous poussons également vers le parc Fray Jorge. Paysage désertique et cactus sont d'abord au rendez-vous puis, après 25 kilomètres d'une piste très difficile pour notre pauvre véhicule, nous arrivons au sommet d'une colline imposante. De l'autre côté est le pacifique et surtout une végétation luxuriante et quasi tropicale.

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L'explication de ce phénomène est toute simple : la brume marine (la Camanchaca) est piégée par la colline et se répand sous forme d'eau sur les arbres et la végétation environnante. Une expérience utilisant ce phénomène est menée plus au nord pour fournir de l'eau à tout un village : les "attrapes brumes". Et ça marche parfaitement !

Le 21 septembre, nous prenons le bus pour Santiago. Après une demi-heure nous tombons en panne et restons deux heures bloqués sur le bord de la route ! N'ayant pas grand-chose à faire, nous sortons un jeu de dés et commençons un Yam's. Un gamin d'une quinzaine d'année nous regarde. Nous l'invitons à se joindre à nous et après lui avoir expliqué les règles, nous passons les deux heures assis sur le bord de la route à jouer aux dés. Le bus étant tout de même reparti, nous arivons à Santiago dans la soirée.

Santiago

Le 22, premier jour dans la capitale du Chili, nous prenons contact avec la ville. Rapidement, nous nous retrouvons devant le palais de la Moneda, celui-là même qui était bombardé par les avions des généraux félons le 11 septembre 1973

Devant le palais et à notre grand étonnement, une statue de Salvadore Allende ! La visite de la Moneda n'est pas autorisée, mais nous pouvons y rentrer et voir les cours intérieures. Emotion quand un garde nous indique le bureau du président, au premier étage.

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Le lendemain, nous prenons le métro, copie de la ligne 1 de celui de Paris. Il n'y a rien que de très normal, car ce sont les français d'Alsthom qui l'ont construit. Des publicités pour JC Decaux ornent les murs. On se croirait chez nous !

Nous sortons quelques stations plus loin pour découvrir, très proches de la ville, les sommets enneigés de la cordillère.

Nous déjeunons au Venezia, restaurant fréquenté par Pablo Neruda, dont la maison de Santiago, la "Chascona" est tout à côté. C'est là que nous allions, ça tombe plutôt bien !

Comme dans tout les restos du Chili, nous avons sur la table avant de manger, un ramequin contenant un mélange de tomates, oignons, piment et persil. Le pain servi avec est chaud et l'ensemble est délicieux, même si le piment est parfois majoritaire dans le mélange…

Aprés le repas, nous nous rendons donc à la Chascona. Cette maison est aujourd'hui transformée en musée Neruda ainsi que les deux autres propriétés du prix Nobel de littérature, celle de Valparaiso et celle de l'île noire.

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La maison qui se visite avec un guide est magnifique. Beaucoup d'objets touchant à la mer pour ce passionné de l'océan qui ne savait pas nager et qui avait le mal de mer !